Souvenez-vous. Les ferrets de la reine Anne d'Autriche, le duc de Buckingham, les perfidies de Richelieu, le siège de La Rochelle. Et, vingt ans après, l'autre cardinal, la Fronde, l'Angleterre de Cromwell, l'exécution de Charles 1er...
Cette Histoire-là est inoubliable. Elle reste dans nos mémoires, revivifiée pour l'éternité par la présence des héros d'Alexandre Dumas, ces trois mousquetaires qui sont quatre - " tous pour un, un pour tous " -, par la magie de ces romans où vibrent, à l'infini, dans le fracas des chevauchées et des épées, la fougue de la jeunesse, le goût de l'aventure, la force de l'amitié, la nostalgie du temps qui passe, la mort qui rôde, aussi, portée par les vents contraires des grands événements.
C'est le théâtre qui avait fait d'abord la gloire de Dumas. On découvrira ici La Jeunesse des mousquetaires qu'il adapta pour la scène en 1849.
Une collection unique, souvent imitée, jamais égalée, qui explore tous les champs du savoir et de la littérature et qui est devenue, en moins de trois décennies, la bibliothèque idéale de l'honnête homme de notre temps. Chez « Bouquins », nous publions aussi bien des dictionnaires d'histoire, de musique ou de littérature que des récits de voyage, des grands classiques de la littérature mondiale ou de l'art de vivre que des portraits de ville ou des textes sacrés. Ils ont été établis par les meilleurs spécialistes et font référence dès leur parution. « Bouquins » s'adresse à tous ceux qui ont la passion de lire et de découvrir, aussi bien à l'étudiant qu'au professeur ou à l'amateur de curiosités, bref à tous ceux qui croient encore qu'un bon livre reste l'un des plus merveilleux compagnons qui nous ait été donné depuis que Gutenberg, avec ses caractères de plomb et d'antimoine, ses moules en métal et ses poinçons, a permis aux textes, parfois tirés de la nuit de l'oubli, de rencontrer en Europe leurs lecteurs par milliers.
Le marquis de Sade (1740-1814) est souvent réduit aux infortunes de la vertueuse Justine et aux prospérités de Juliette la criminelle. Il a pourtant consacré les dernières années de sa vie à brosser le portrait de trois femmes d'énergie qui bousculent toute partition simpliste.
Enfermé par mesure administrative en 1801 à l'hôpital psychiatrique de Charenton, il lit Germaine de Staël et Chateaubriand, se passionne pour l'histoire nationale et, ayant vécu l'effondrement de l'Ancien Régime et les bouleversements de la Révolution, s'interroge sur le sens de l'histoire. Privé de liberté, il s'évade dans l'imaginaire, voyage à travers l'espace et le temps. Il retrouve la Provence de son enfance en racontant un fait divers tragique du XVIIe siècle : l'assassinat de la marquise de Gange par ses beaux-frères, avec la complicité du mari. Le roman est publié anonymement en 1813.
Sade fait ensuite traverser l'Allemagne du XIe siècle à Adélaïde de Brunswick, princesse passionnée et volontaire qui finit comme une sainte, puis il retrace, au tournant du XIVe au XVe siècle, l'Histoire secrète d'Isabelle de Bavière, qui lui permet de parler de la Révolution française et aussi de la médecine psychiatrique. Isabelle de Bavière, épouse d'un roi dément, y devient une flamboyante Marie-Antoinette médiévale. La guerre de Cent Ans, qui oppose de est une façon de raconter la Terreur. Ces deux derniers romans, restés manuscrits durant un siècle et demi, ont été révélés au milieu du XXe siècle. Ils attendaient une édition philologique.
À la suite de La Marquise de Gange, d'Adélaïde de Brunswick et d'Isabelle de Bavière, on trouvera un inédit : les notes de Sade à la lecture de Delphine de Germaine de Staël.
Edition établie et présentée par Michel Delon.
Sous la forme d'une éphéméride, et ce sur presque tous les jours de cette année 2020, je consigne chaque délire dont notre temps est capable.
Dans ce journal se croisent une petite fille de huit ans qui veut changer de sexe depuis l'âge de quatre ans ; des égorgeurs présentés comme de pauvres victimes d'elles-mêmes ; une jeune fille qui ne va plus à l'école et prophétise la catastrophe climatologique dont le clergé de son pays nous dit qu'elle est le Christ ; des femmes qui vendent des enfants pendant que d'autres les achètent ; l'Église catholique qui court après les modes du politiquement correct ; le journal Libération qui se dit progressiste en célébrant la coprophagie et la zoophilie ; des végans qui militent contre les chiens d'aveugles ; une anthropologue qui trouve qu'il y a trop de dinosaures mâles et pas assez de femelles dans les musées ; des pédophiles qui achètent des viols d'enfants en direct sur le Net ; un Tour de France qui commence au Danemark et un Paris-Dakar ayant lieu en Amérique du Sud ; un parfum élaboré par une femme à partir des odeurs de son sexe ; un chef de l'État qui, entre autres sorties, se félicite que ses ministres soient des amateurs ; Le Monde qui estime courageuse une mise en scène théâtrale qui présente Lucien de Rubempré en femme ; le pape et Tariq Ramadan pour qui le coronavirus est une punition divine - et autres joyeusetés du même genre... Entre rire voltairien et rire jaune, cette Nef des fous est un genre de journal du Bas-Empire de notre civilisation qui s'effondre.
M. O.
1815. Accusé de bonapartisme, Edmond Dantès est emprisonné au château d'If, victime de deux rivaux, Fernand et Danglars, et de Villefort, un magistrat ambitieux. Grâce à l'amitié de l'abbé Faria, il s'évade et peut alors assouvir sa vengeance. Version abrégée avec dossier pédagogique.
À bien des égards, Les Essais constituent l'oeuvre fondatrice des lettres françaises et de la pensée occidentale moderne, dont Montaigne est l'un des pères. Or rares sont ceux qui, en France, peuvent vraiment lire Montaigne, hormis les spécialistes, à cause des difficultés du moyen français. Une nouvelle édition des Essais s'imposait, non pas « modernisée » et encore moins « traduite en français moderne », mais rajeunie et rafraîchie, pour rendre enfin accessible l'oeuvre du plus contemporain de nos classiques, le seul qui sache allier savoureusement des réflexions sur l'amour, la politique, la religion, et des confidences plus intimes sur sa santé ou sa sexualité.
L'objectif de cette monumentale entreprise conduite par Bernard Combeaud, avec le concours de Nina Mueggler, est d'offrir des Essais restaurés et revitalisés, à partir de l'édition de 1595, pour que chacun puisse s'entretenir commodément avec un écrivain aux idées foisonnantes, salué par Stefan Zweig comme « l'ancêtre, le protecteur et l'ami de chaque homme libre sur terre ».
Les traductions du grec et du latin sont toutes originales, les notes ont été réduites au minimum. Seules la ponctuation, l'accentuation, l'orthographe ont été systématiquement modernisées dans le souci constant de préserver la saveur originelle d'une langue si singulière, de préserver les images, les jeux de mots, les idiotismes gascons ou latinisants propres au style de Montaigne.
Dans une longue préface inédite et percutante, Michel Onfray désigne l'auteur des Essais comme l'un de ses maîtres à penser et à vivre. Il explique « pourquoi et comment il faut lire et relire Montaigne », philosophe qui apprend à « savoir jouir loyalement de son être ».
Dans le vicomte de bragelonne, l'anéantissement final des corps est la mise en gloire du coeur, et dumas s'y surpasse dans une espèce de désespoir heureux, donnant en partage au lecteur sa joie et sa tristesse de créateur: "pauvre porthos! il m'a semblé, je ne sais si c'est une illusion de mon coeur ou de mon orgueil, il m'a semblé que le jour oú vous avez fait part à la france de son trépas, un voile de deuil s'est étendu sur paris.
On s'était figuré, n'est-ce pas, que nos quatre héros étaient immortels, et quand on a vu tomber le plus fort et peut-être le meilleur de tous, on a senti instinctivement que la mort n'entrerait pas pour si peu dans ce quadrille de géants, et que l'un au tombeau, les autres ne tarderaient pas à l'y suivre . le métier de romancier a certes bien ses plaisirs, ses joies, ses orgueils surtout, mais comme il a ses tristesses aussi, et une de ces tristesses-là, tristesse incompréhensible peut-être pour quelques-uns, mais réelle, mais profonde, mais infinie pour moi, c'est d'avoir donné le jour à un personnage, de l'avoir élevé, choyé, vu grandir, et au jour venu de sentir l'implacable nécessité qui vient vous sommer de rendre à la terre, c'est-à-dire à l'oubli, ce doux rêve de votre imagination dont vous étiez habitué à être le compagnon, le conseiller, le père" (lettre d'a.
Dumas à perrée).
"c'est avec ces convictions et ces solidarités-là qu'on écrit des chefs-d'oeuvre", concluait dumas fils qui avait trouvé son père assis tristement, les yeux rouges encore du chagrin qu'il avait éprouvé à faire mourir son héros.
Cette édition en deux volumes des oeuvres de Maupassant reprend l'intégralité de ses contes et nouvelles ainsi que ses deux romans les plus célèbres, Une vie (1883) et Bel-Ami (1886).
Durant dix ans, de 1880 à 1890, Maupassant, fidèle collaborateur du Gaulois et du Gil Blas, soumit à la presse des contes et nouvelles selon un rythme bi-hebdomadaire. Comme nous ne disposions pas d'une édition complète revue par l'auteur de ces oeuvres, et alors que le nombre impressionnant de celles-ci imposait un classement rigoureux, nous nous sommes efforcés, d'une part, de respecter les recueils publiés du vivant de Maupassant et, d'autre part, de placer auprès de ces recueils, par ordre chronologique, les contes rédigés à la même époque mais non rassemblés en volumes avant sa mort.
Les deux romans qui figurent en outre dans la présente édition ont été insérés là où l'imposait le déroulement de l'oeuvre, c'est-à- dire, respectivement, dans le premier et dans le second volume.
L'édition des oeuvres de Maupassant dans la collection « Bouquins » comporte deux volumes.
Le tome 1 comprend : Quid de Guy de Maupassant - Contes divers (1875-1880) - La Maison Tellier - Contes divers (1881) - Mademoiselle Fifi - Contes divers (1882) - Contes de la bécasse - Clair de lune - Contes divers (1883) - Une vie (roman) - Miss Harriet - Les Soeurs Rondoli.
Le tome 2 comprend : Yvette - Contes divers (1884) - Contes du jour et de la nuit - Bel-Ami (roman) - Contes divers (1885) - Toine - Monsieur Parent - La Petite Roque - Contes divers (1886) - Le Horla - Contes divers (1887) - Le Rosier de Madame Husson - La Main gauche - Contes divers (1889) - L'Inutile Beauté.
On se contente trop souvent d'admirer les premiers livres : mélancolie sombre des Poèmes saturniens, rêverie exquise des Fêtes galantes, impressionnisme musical des Romances sans paroles, haut lyrisme chrétien de Sagesse. Mais l'on néglige ce qui suit et deux tiers de l'oeuvre sont condamnés à l'oubli. Pourtant, Verlaine n'a cessé d'explorer des voies nouvelles. Ainsi découvrira-t-on l'esthétique de la sincérité et de la simplicité dans Bonheur, les parodies et les pastiches de Dédicaces, les poèmes satiriques d'Invectives, l'ardent érotisme de Chansons pour Elle, la tendresse d'Elégies, la poésie ludique d'Epigrammes. Même les poèmes érotiques, publiés sous le manteau, figurent dans la présente édition qui fournit enfin un panorama complet de cette oeuvre si diverse. Verlaine a fait vibrer " toute la lyre ", aucun domaine de la poésie ne lui est demeuré étranger.
Ce volume - complété par une Chronologie et un Dictionnaire - permet de suivre l'itinéraire de Verlaine dans ses méandres et ses caprices, et de mieux apprécier Romances sans paroles, son chef-d'oeuvre ; le poète s'y est aventuré, comme nul autre avant lui, dans l'espace intérieur de la rêverie et, par le raffinement de la musique verbale, il a réussi à suggérer l'indicible.
Les quarante-cinq constitue le troisième volet du grand triptyque que dumas a consacré à l'histoire de france de la renaissance.
Il achève le récit de cette décadence de la seigneurie commencé par la reine margot et poursuivi avec la dame de monsoreau.
A cette époque déchirée, tout se joue sur fond de guerre : guerres de religion, guerres dynastiques, guerres amoureuses. aussi les héros meurent-ils plus souvent sur l'échafaud que dans leur lit, et les héroïnes sont meilleures maîtresses que mères de famille.
Ce qui fait la grandeur des personnages de dumas, c'est que chacun suit sa pente jusqu'au bout, sans concession, mais avec panache.
D'oú l'invincible sympathie qu'ils nous inspirent. parmi eux, chicot, le célèbre bouffon, qui prend la place du roi. c'est en lui que dumas s'est reconnu. n'a-t-il pas tiré ce personnage entièrement de son imagination ? mais sa véracité lui permet d'évoluer avec aisance au milieu des personnages historiques dont il lie les destins. dumas ayant achevé son roman à la veille de la révolution de 1848, chicot incarne par avance la bouffonnerie de l'histoire.
Guy schoeller.
Je considère les mémoires de casanova comme la véritable encyclopédie du xviiie siècle, [.
] ce grand vivant de casanova qui connaissait tout le monde, les gens et les choses, et la façon de vivre de toutes les classes de la société dans les pays d'europe, et la route et les hostelleries, les bordels, les tripots, les chambrières, les filles de banquiers, et l'impératrice de russie pour qui il avait fait un calendrier, et la reine de france qu'il avait interviewée, et les comédiennes et les chanteuses d'opéra, casanova qui passait aux yeux de la police pour un escroc dangereux et dans les salons pour un beau joueur ou un sorcier, le brillant chevalier de seingalt, chevalier d'industrie, qui fréquentait les ouvriers, les artisans, les brodeuses, les marchandes à la toilette, le petit peuple des rues, cochers et porteurs d'eau, avec qui il était à tu et à toi comme avec le prince de ligne [.
] qui se mourait d'impatience pour avoir la suite de ses mémoires. [. ] casanova a même échappé à l'emprise des profs, des thèses, de l'université, c'est pourquoi il est un éducateur incomparable de la jeunesse qui aimera toujours la vie et l'amour, les femmes et le vin, les aventures et la réussite, l'insubordination et le jeu, la société oú l'on s'encanaille et le monde, les affaires d'honneur qui comportent un grain de folie, une entreprise aussi désespérée que celle de l'évasion des plombs de venise, l'argent que l'on jette par les fenêtres, un corps bien exercé et la façon de s'en servir avec esprit sinon avec scrupules, et comme notre bel aventurier n'a écrit dans aucune langue avouable, il ne peut être réclamé par aucune nation pour être déformé officiellement, réformé.
Casanova a toujours couru sa chance et continue.
Blaise cendrars pro domo, 1949.
Cette nouvelle édition de l'Histoire de ma vie est entièrement basée sur le manuscrit acquis par la BNF en 2010. Elle en respecte pour la première fois le découpage et procure un texte fiable, corrigé des erreurs de transcription de la précédente édition Brockhaus-Plon de 1960 (reprise en " Bouquins " par F. Lacassin en 1993). Ce premier volume, remanié en profondeur, reproduit les tomes 1 à 3 des Mémoires de Casanova, depuis l'enfance de Giacomo jusqu'à son évasion de la prison des Plombs en novembre 1756.
Une nouvelle préface présente un Casanova éloigné des clichés pour faire apparaître l'importance de l'écrivain et du penseur. L'appareil critique, lui aussi renouvelé et enrichi, se concentre sur le travail d'écriture de Casanova : il restitue l'histoire de la langue, éclaire son choix d'écrire en français sans renoncer à l'italianité (" La langue française est la soeur bien-aimée de la mienne ; je l'habille souvent à l'italienne ", écrit-il), et retranscrit dans la mesure du possible les passages biffés sur le manuscrit.
Ce volume I reproduit trois variantes importantes : les différents projets de préface, les deux versions du premier séjour parisien (1750-52), reproduites en regard l'une de l'autre, et le récit de l'évasion de Casanova publié en 1788 sous le titre Histoire de ma fuite des Plombs.
Enfin, on y trouvera plusieurs documents permettant de mieux comprendre le monde de Casanova : évaluation de ses revenus, tables de conversion des monnaies européennes, règles des jeux comme le pharaon, et déplacements du Vénitien (cartes du monde méditerranéen, quartiers de Venise et de Paris).
Arthur Rimbaud a écrit toute son oeuvre, l'une des plus belles de notre langue, entre seize et vingt ans. Pour des générations de lecteurs, l'oeuvre et la vie forment un mythe : le jeune poète qui fugue et dort à la belle étoile ; le rejet de la contrainte morale et familiale ; la détestation de la province ; les poèmes envoyés par la poste dans des lettres insuffisamment affranchies ; la bohème ; le voleur de feu et le voleur de livres ; le voyage qui permet de transbahuter la vie ; l'amour fou pour Verlaine ; bientôt le « Départ » et le commerce du café, de la gomme, du musc au bord de la mer Rouge et les caravanes à soixante chameaux dans le désert.
L'ouvrage de Jean-Jacques Lefrère s'est imposé comme la biographie de référence, la plus sûre et, de loin, la meilleure, parce qu'elle contient l'ensemble des informations disponibles, en tout cas les plus plausibles, et parce qu'elle dit même ce qu'on ne sait pas. En creux, on y lit aussi la meilleure biographie de Verlaine.
Médecin lettré et scientifique positiviste, Jean-Jacques Lefrère réalise ici ce qu'il faut bien appeler une autopsie, une dissection de la vie de Rimbaud. Sa méthode : le culte du document et l'ampleur de la documentation. Son ambition : dire les faits. Son sentiment : la passion pour l'oeuvre. Si les biographies de Rimbaud sont nombreuses, celle-ci, qui n'a d'autre objectif que le « vrai », est unique.
Dans une longue préface sur Rimbaud et son influence, il m'a semblé important d'expliquer pourquoi, longtemps après la mort du poète, nous sommes toujours « rimbaldiens ».
Frédéric Martel ;
Proust disait que, composant le temps retrouvé, il écrivait son vicomte de Bragelonne.
Le vicomte de Bragelonne est un roman-fleuve dans lequel se sont jetés tous les genres : épopée, roman picaresque, drame politique ou sentimental, comédie de moeurs ou d'intrigues, vaudeville, et qui reflète l'infini.
Dumas y raconte pour le peuple la mort de Mazarin, la disgrâce de Fouquet et la prise du pouvoir par Louis XIV, c'est-à-dire l'avènement de la monarchie absolue, apogée de cette « royauté qui a fait en France tout le bien et tout le mal qu'elle pouvait faire ».
Mais, en filigrane, il décrit la confrontation de l'homme avec le temps et la mort : « que reste-t-il à l'homme après la jeunesse, après l'amour, après la gloire, après l'amitié, après la force, après la richesse ? ce rocher sous lequel dort Porthos, qui posséda tout ce que je viens de dire ; cette mousse sous laquelle reposent Athos et Raoul, qui possédèrent plus encore. » L'interrogation poignante et la réponse désabusée de d'Artagnan sont celles de Dumas lui-même s'apprêtant à descendre le versant désolé de la vie.
Le roman est parcouru d'un frémissement tragique sans lequel il n'est pas de grande littérature.
Il y a les injures et les pamphlets, et puis il y a les méchancetés spirituelles : celles qu'inspire une conversation ou un échange, lorsque la présence d'esprit l'emporte sur la méchanceté brute. Il y a aussi les épigrammes, ces quelques vers faits promptement pour couler une méchanceté. Saillies et épigrammes : voilà le lecteur transporté dans toutes les époques à l'occasion de ce répertoire, ou plutôt de cette collection classée par noms propres. Il y a des lieux et des époques qui, il est vrai, se sont spécialement illustrés dans cet art, certes très secondaire, mais qui a le mérite d'être pris sur le vif et d'être toujours révélateur de quelque chose : les cercles littéraires du XVIe et du XVIIe siècle, les salons et la cour de France au XVIIIe siècle, le milieu des journaux et du théâtre de boulevard au XIXe siècle, le monde politique et la société mondaine de la IIIe République, l'Angleterre post-victorienne, la grande époque hollywoodienne, entre les deux guerres... Mais on se promène aussi bien dans l'Antiquité, dans la société bigarrée de l'Empire, et même dans ce XXe siècle qui n'a pas toujours fait rire. Pour mieux situer les dialogues qui esquissent une anecdote, s'y ajoutent près de mille notices biographiques, qui rappellent des choses enfouies ou rapportent des traits qu'aujourd'hui on ne trouverait guère ailleurs. L'auteur s'est attaché à cultiver une indéniable liberté d'esprit pour remettre les histoires sur l'incroyable scène du réel, et honorer des personnages qui se sont illustrés par une grande liberté de ton.
De 1952 à 1970, pendant près de vingt ans, François Mauriac a régné sur le journalisme politique, à L'Express puis au Figaro, dont il fut l'éditorialiste vedette. Il y a inventé une catégorie particulière, celle de l'écrivain-journaliste. Il connut à travers son Bloc-notes un rayonnement exceptionnel. Son influence sur l'opinion lui valait d'être craint par les pouvoirs en place, de droite comme de gauche, dont il ne cessa de stigmatiser, souvent avec férocité, la corruption, l'impuissance et la médiocrité.
Mauriac maniait avec un brio implacable l'art de la polémique et rares sont ceux qui eurent grâce à ses yeux : essentiellement Pierre Mendès France, qu'il défendit avec fougue au moment de son bref passage à la tête du gouvernement, et Charles de Gaulle, auquel il apporta un soutien fervent, notamment durant la guerre d'Algérie et jusqu'à son départ.
Malgré son peu d'indulgence, Mauriac s'exprimait en tant que chrétien au nom d'une exigence de justice et de charité. Ce sont ces convictions qui inspirèrent son combat en faveur de la décolonisation et contre toutes les formes d'oppression et de discrimination.
Oeuvre d'engagement, son Bloc-notes raconte et traverse deux décennies d'histoire française comme une véritable dramaturgie romanesque. L'écrivain y livre aussi beaucoup de lui-même, de sa foi, de ses goûts littéraires, de son amour de la nature et des paysages qui lui sont restés familiers depuis son enfance. Témoin tour à tour fasciné, amusé, indigné et plus rarement admiratif d'une actualité souvent tragique, il ne s'éloigne jamais de lui-même en parlant des autres, explorateur inlassable des passions humaines.
Jean-Luc Barré.
Oeuvre monumentale qui couvre soixante-dix ans de la vie de l'écrivain, le Journal de Julien Green n'avait pourtant jamais été publié dans sa version intégrale et définitive. L'auteur en avait délibérément écarté les pages les plus intimes, l'évocation de sa vie amoureuse et certains portraits littéraires dans lesquels il livrait une opinion sans fard sur quelques-uns de ses pairs.
Jugeant impubliable de son vivant cette « confession qui rétablissait la vérité » et où l'on saurait « tout » de lui, selon sa formule, Julien Green s'est cependant toujours montré favorable à l'idée que cet ensemble soit exhumé le moment venu par ses héritiers, leur laissant le choix d'en décider en fonction des instructions qu'il leur avait laissées. C'est chose faite aujourd'hui, grâce à cette édition conçue à partir des manuscrits originaux par Guillaume Fau, Alexandre de Vitry et Tristan de Lafond.
Entre préoccupations métaphysiques et notations relatives à son travail de créateur, le grand romancier catholique, porté par une exaltation incessante de la jeunesse et de la beauté, livre ici, avec une sincérité sans détour et de la façon souvent la plus crue, le récit de ses rencontres et aventures homosexuelles, de ses rapports avec des amants de passage comme avec son compagnon de l'époque, Robert de Saint Jean. Julien Green n'ignorait pas que ces pages restées longtemps confidentielles pourraient surprendre, voire scandaliser, le jour où elles seraient révélées. Mais il tenait les exigences de la chair pour indissociables de celles de l'esprit : une conviction qu'il ne cesse d'illustrer à travers cette magnifique célébration du désir et de la passion. Son « journal complet », comme il le qualifiait, offre ainsi une approche plus authentique de sa vie comme de l'ensemble de son oeuvre.
De 1952 à 1970, pendant près de vingt ans, François Mauriac a régné sur le journalisme politique, à L'Express puis au Figaro, dont il fut l'éditorialiste vedette. Il y a inventé une catégorie particulière, celle de l'écrivain-journaliste. Il connut à travers son Bloc-notes un rayonnement exceptionnel. Son influence sur l'opinion lui valait d'être craint par les pouvoirs en place, de droite comme de gauche, dont il ne cessa de stigmatiser, souvent avec férocité, la corruption, l'impuissance et la médiocrité.
Mauriac maniait avec un brio implacable l'art de la polémique et rares sont ceux qui eurent grâce à ses yeux : essentiellement Pierre Mendès France, qu'il défendit avec fougue au moment de son bref passage à la tête du gouvernement, et Charles de Gaulle, auquel il apporta un soutien fervent, notamment durant la guerre d'Algérie et jusqu'à son départ.
Malgré son peu d'indulgence, Mauriac s'exprimait en tant que chrétien au nom d'une exigence de justice et de charité. Ce sont ces convictions qui inspirèrent son combat en faveur de la décolonisation et contre toutes les formes d'oppression et de discrimination.
Oeuvre d'engagement, son Bloc-notes raconte et traverse deux décennies d'histoire française comme une véritable dramaturgie romanesque. L'écrivain y livre aussi beaucoup de lui-même, de sa foi, de ses goûts littéraires, de son amour de la nature et des paysages qui lui sont restés familiers depuis son enfance. Témoin tour à tour fasciné, amusé, indigné et plus rarement admiratif d'une actualité souvent tragique, il ne s'éloigne jamais de lui-même en parlant des autres, explorateur inlassable des passions humaines.
Jean-Luc Barré.
« Non, je ne voulais pas écrire. Quand on peut pénétrer dans le royaume enchanté de la lecture, pourquoi écrire ? Cette répugnance, que m'inspirait le geste d'écrire, n'était-elle pas un conseil providentiel ? Il est un peu tard pour que je m'interroge là-dessus. Ce qui est fait est fait. Mais dans ma jeunesse, je n'ai jamais, jamais désiré écrire. Non, je ne me suis pas levée la nuit en cachette pour écrire des vers au crayon sur le couvercle d'une boîte à chaussures ! Non, je n'ai pas jeté au vent d'ouest et au clair de lune des paroles inspirées ! Non, je n'ai pas eu 19 ou 20 pour un devoir de style, entre douze et quinze ans ! Car je sentais, chaque jour mieux, je sentais que j'étais justement faite pour ne pas écrire. Je n'ai jamais envoyé, à un écrivain connu, des essais qui promettaient un joli talent d'amateur ; pourtant, aujourd'hui, tout le monde le fait, puisque je ne cesse de recevoir des manuscrits. J'étais donc bien la seule de mon espèce, la seule mise au monde pour ne pas écrire. Quelle douceur j'ai pu goûter à une telle absence de vocation littéraire ! » Colette, Journal à rebours (1941).
Cette édition des oeuvres de Colette comprend trois volumes.
Le tome 1, Romans, récits, souvenirs (1900-1919), contient : Claudine à l'école, Claudine à Paris, Claudine en ménage, Claudine s'en va, La Retraite sentimentale, Les Vrilles de la vigne, L'Ingénue libertine, La Vagabonde, L'Envers du music-hall, L'Entrave, La Paix chez les bêtes, Les Heures longues, Dans la foule, Mitsou.
Le tome 3, Romans, récits, souvenirs (1941-1949). Critique dramatique (1934-1938), contient : Journal à rebours, Julie de Carneilhan, De ma fenêtre, Le Képi, Trois... six... neuf..., Gigi, Belles saisons, L'Étoile Vesper, Pour un herbier, Le Fanal bleu, Autres bêtes, En pays connu, La Jumelle noire.
Il peut nous arriver de déplorer le côté monotone et ennuyeux de la réalité mais si on l'observe bien, elle peut nous apporter son lot de cocasseries et d'insolite. Il suffit d'avoir l'oeil pour découvrir autour de soi, au coin de la rue, ou chez les bouquinistes, une telle matière à rire que l'on ne peut alors s'empêcher de s'écrier : « Ça ne s'invente pas ! » Jean-Loup Chiflet, très sensible à ce qu'il convient bien d'appeler « L'humour involontaire » s'est mis en quête depuis des années de plonger dans des eaux troubles pour en retirer des documents étonnants, insolites et improbables ; tels certains manuels scolaires ( Par admiration, on appelait Charlemagne l'empereur à la barbe fleurie bien qu'il n'ait pas de barbe) ou religieux (Le petit Jésus passait ses vacances à la montagne chez son cousin Jean-Baptiste) et de guides dits de civilités commis au début du XXe siècle par des baronnes et autres comtesses (On peut dire merci aux domestiques, mais seulement de temps en temps) et surtout les fameux Almanachs Hachette qui, avec l'usure du temps, sont tombés en désuétude pour notre plus grand plaisir (Les porteurs de grandes oreilles sont des naïfs). Mais cette intarissable source comique nourrie par la bêtise, l'étourderie, le mauvais goût, sans compter avec le génie du hasard ne jaillit pas seulement du fond des âges ; on trouvera aussi dans ce catalogue déraisonné, des perles récentes tout aussi saugrenues de fonctionnaires, de victimes de l'administration, de journalistes (Auguste Lumière s'éteint), d'élèves etc. Ainsi, la réalité, quand elle dépasse la fiction, est plus attrayante car elle n'obéit à aucune loi contrairement à la fiction, soumise à des règles strictes, condamnant l'écrivain à respecter une certaine véracité qui le met en état d'infériorité face à la vraie vie.
Principales têtes de rubriques : Administration - Animaux - Amour - Arts - Assurances - Bon Dieu - Bon sens - Culture/Littérature - Éducation - Garde-à-vous - Petites histoires de l'Histoire - Ils auraient mieux fait de se taire - Justice - Jeunesse - Langage - Les politiques - Poste restante - Presse - Médecine - Savoir-vivre - Sciences et technique - Sports - Vie quotidienne - Voyage.
« Dans l'histoire de la littérature, écrit Simon Leys, je ne vois guère que Tchekhov chez qui la qualité de l'homme semble avoir correspondu à la qualité de l'artiste. » Vivre de mes rêves en est la vivante illustration. C'est le roman vrai de la vie d'un génie humble, soucieux du sort des autres et d'une rare générosité, dont, par-delà le temps, on a envie de conquérir l'amitié bienveillante, moqueuse, tendre et fidèle...
Cette vaste correspondance permet d'accompagner au fil de son existence cet homme et écrivain aussi soucieux de son art que dévoué à sa famille, à ses amis, à ses patients - un médecin animé par une conception humaniste de son métier et une inquiétude profonde devant l'absurdité de la condition humaine mêlée, pour celle-ci, d'une tendresse fraternelle. Dans ce choix de lettres il raconte sa passion pour le théâtre, son dangereux voyage de reporter à l'île bagne de Sakhaline, ses démêlés avec les éditeurs de ses récits. Grâce à ses conseils à des apprentis écrivains, on peut aussi apprécier les secrets d'un art d'écrire unique, exquis et délicat. « Ma fonction, confiait-il, consiste uniquement à avoir du talent, c'est-à-dire à savoir distinguer les dépositions importantes de celles qui ne le sont pas, à savoir éclairer les personnages et parler leur langue. Chtcheglov-Leontiev me fait grief d'avoir terminé mon récit par la phrase suivante : « On n'y entend goutte en ce monde ! » D'après lui, l'artiste-psychologue se doit d'analyser, c'est en cela qu'il est psychologue. Mais je ne suis pas d'accord avec lui. Il serait temps que les gens qui écrivent, en particulier les artistes, reconnaissent qu'en ce monde on n'y entend goutte. » Des farces entre frères ou cousins aux histoires d'amour impossibles, c'est un Anton Tchekhov intime, sans fard, qui s'offre à nous jusque dans les dernières années de sa vie, découvrant l'amour et le bonheur au moment où la maladie va l'emporter inexorablement.
Dans la préface éclairante et passionnée qu'il consacre à ce volume, Antoine Audouard, initiateur et éditeur du projet, rend hommage à juste titre au « travail admirable » de la traductrice, Nadine Dubourvieux, dont la première tâche fut de choisir les lettres dans la monumentale édition soviétique des oeuvres complètes et de traquer avant de les rétablir les nombreux passages censurés pour indécence, restituant ainsi Tchekhov dans sa vérité sans rien occulter de ses faiblesses ou de ses préjugés.
Arthur Rimbaud (1854-1891) a traversé la poésie française comme un météore. Les fulgurances de son oeuvre, créée au sortir de l'adolescence puis abandonnée, les désordres de sa vie vagabonde et sa disparition prématurée fascinent et déconcertent à la fois. De son vivant déjà, il est une figure légendaire, un mythe, qui se résume souvent à une formule : voyou, voyant, mystique (fût-ce à l'état sauvage), communard, négrier, érotomane, scatologue. Autant d'étiquettes, de jugements à l'emporte-pièce qui masquent la vérité de sa vie et de son oeuvre.
Certes, l'enfant prodige de Charleville, le compagnon turbulent de Verlaine ou le négociant implanté à Harar a multiplié les provocations à plaisir et cultivé les contradictions les plus irritantes à dessein. Rimbaud nous nargue, nous échappe. Comme il s'échappe à lui-même. « Homme aux semelles de vent », il tend des cordes de clocher en clocher et danse. Rimbaud va vite. En quelques années, il crée une oeuvre, en vers et en prose, qui parachève des siècles de poésie et fonde les interrogations de toute poésie moderne.